DSP2 : le germe et le fondement d’une véritable rupture

par | Jan 15, 2018 | Business | 0 commentaires

La DSP2 -en vigueur depuis le 13 janvier 2018- ne vise pas uniquement à entamer le monopole bancaire. Elle donne aux fintechs les moyens de concurrencer les géants du web.

«Des services de paiements moins chers, plus sûrs et plus innovants», assure la Commission européenne. Tel est l’objectif de la DSP2, la  directive révisée sur les services de paiements, laquelle «intègre et abroge» la première directive sur le sujet adoptée en 2007. Ce texte a fait l’objet d’une âpre bataille entre la Commission européenne, l’Autorité bancaire européenne (ABE), les banques et les start-up de la fintech. L’objectif est de «favoriser l’innovation, la concurrence et l’efficience» du marché et, plus précisément, de «moderniser les services de paiement en Europe au profit tant des consommateurs que des entreprises, de manière à rester en phase avec ce marché en évolution rapide», selon la Commission.

Comme le note Sopra Banking, la DSP2 vise à accélérer le développement de nouveaux services tout en maîtrisant les risques associés. Parmi ses principaux apports, la généralisation de l’authentification forte et la régulation des fournisseurs de nouveaux services. Les établissements gestionnaires de comptes se voient désormais contraints d’ouvrir l’accès aux comptes et aux données de leurs clients à ces nouveaux prestataires, qui initieront un paiement ou offriront des services d’information sur des comptes qu’ils ne gèrent pas.

Quelles alternatives pour les banques ?

«On le voit bien, note encore l’éditeur, il ne s’agit pas là d’une simple évolution. La DSP2 porte en elle le germe et le fondement d’une véritable rupture. Combiné à la créativité et aux capacités digitales des fintechs, l’accès réglementé et sécurisé aux comptes va en effet à terme à la fois enrichir et concurrencer les méthodes actuelles d’accès aux services bancaires, et donc menacer les positions des acteurs historiques.» Quelles alternatives pour les banques face à ce danger imminent ? S’opposer serait vain. Subir n’est pas satisfaisant. Passer à l’offensive pour tirer parti de cette nouvelle donne ? Telle est la seule solution pour ne pas se voir cantonnées à la fourniture de services de base que d’autres enrichiraient, et risquer de perdre la relation avec leurs clients.

Il s’agit dès lors pour les banques de proposer des services à valeur ajoutée s’intégrant dans les parcours client ou les processus économiques plus larges. D’autres secteurs comme celui de l’assurance le font déjà, avec des applications mobiles aidant l’utilisateur à déclarer un accident ou un dégât, ou prévoyant même l’intervention directe de l’expert pour estimer les dégâts et indemniser les clients le plus rapidement possible. Autre exemple, celui de l’automobile et de la multitude de services innovants que l’on peut imaginer autour de son acquisition et son utilisation : depuis l’aide au choix du véhicule, son financement et son assurance, jusqu’à l’entretien, les réparations et la revente. Par rapport aux acteurs qui les challengent sur leur terrain, les banques disposent d’atouts majeurs comme la connaissance de la situation financière des clients et des capacités d’analyse et de conseil.

Devancer les usages

En général, la législation se borne à constater et à encadrer des pratiques bien installées. La DSP2, au contraire, est une réglementation qui devance les usages, relève le cabinet Deloitte. Dans le cas des services de paiement, les enjeux sont aussi critiques que massifs, et ont certainement plaidé pour une prise en compte précoce des effets de la digitalisation et du numérique. Cristallisés dans le texte sous le nom de services d’initiation de paiement et services d’information sur les comptes, ces nouveaux services et la vitesse avec laquelle ils se développent sont révélateurs de l’inertie dans laquelle on les contenait jusque-là.

Avec l’initialisation des instructions de paiement, l’usage de la carte bancaire sur le web est sérieusement mis en balance. Le paiement peut dorénavant être initié directement à partir des comptes du payeur, lequel se borne à confirmer ses instructions. Le commerçant est assuré d’être réglé, tout en bénéficiant d’une réduction des coûts de transaction et d’une souplesse accrue dans les choix de mode de paiement. Les consommateurs profitent eux d’une plus grande visibilité et d’un meilleur confort de gestion grâce à l’agrégation, de l’instantanéité d’exécution, d’une valeur plus large des montants et in fine, de la réduction des coûts répercutée par l’effet de concurrence.

En sortant du monopole bancaire, les services de paiement ont gagné en innovation et en liberté d’accès. Or, cela implique pour les banques au moins une réorganisation de leur infrastructure informatique et au mieux la réorientation d’une partie de leur business model, renchérit le cabinet PwC. Au niveau bancaire, les nouveaux services de paiement consacrés par la DSP 2 font l’effet d’un tsunami, contre lequel les banques ont longtemps cherché à lutter, argumentant leur position par les importantes dépenses générées et le risque sécuritaire encouru.

Peine perdue. Les établissements bancaires doivent dorénavant ouvrir leur système d’information à des tiers capables d’initier à leur place un paiement ou d’offrir une vision consolidée de l’état des comptes. Par-delà une question d’infrastructures informatiques, c’est évidemment l’atteinte manifeste au monopole bancaire qui a émut ses acteurs, en mettant à leur charge l’instruction automatique d’un ordre de paiement sans en tirer de bénéfices.

DSP2, suite logique du SEPA

L’histoire récente de l’évolution des moyens de paiement permettait pourtant de deviner sans grande difficulté l’avenir qui se profilait. La DSP2 est la suite logique du SEPA (Single Euro Payments Area), lequel n’est autre que le prolongement de l’adoption de la monnaie unique au sein de l’Union européenne.

En harmonisant les moyens de paiement en Europe, SEPA a entamé le processus poursuivit par la DSP1 visant à garantir un accès équitable et ouvert aux marchés des paiements. Si les premiers portaient expressément sur les virements, les prélèvements et les paiements par cartes, fort logiquement, une deuxième directive reconnaîtrait et régulerait les paiements en ligne et mobiles, et les services qui leurs sont associés.

Dans cet esprit de concurrence libre, la DSP2 ne vise pas uniquement à entamer le monopole bancaire. Elle donne aux fintechs les moyens de concurrencer les géants du web. Ces derniers n’ont pas manqué l’occasion de s’engouffrer dans la brèche, avec plus ou moins de succès pour l’heure.

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